Madame Butterfly à Turin

Madame Butterfly

Giacomo Puccini

 

Une tragédie japonaise en deux actes (trois parties)

Livret de Luigi Illica et Giuseppe Giacosa

Inspiré du roman de John Luther Long et de la pièce de David Belasco

 

Année de la première représentation: 1904 Milano, Teatro alla Scala

 

Prima ballerina guest                                    Letizia Giuliani

Danseur                                                         Francesco Marzola

Direction, décors et costumes                       Pier Luigi Pizzi

Chorégraphie                                                 Francesco Marzola

Éclairage                                                       Fabrizio Gobbi

Assistant de direction                                    Matteo Anselmi

 

Chef de choeur                                              Andrea Secchi

 

Conducteur                                                  Daniel Oren

Orchestre et Choeur Teatro Regio Torino

 

Association de mise en scène Arena Sferisterio Macerata

 

 

Interprètes

 

Mme Butterfly (Cio-cio-san), soprano        Karah Son

Pinkerton, tenor                                           Murat Karahan

Sharpless, baryton                                        Simone Del Savio

Suzuki, mezzo-soprano                                Sofia Koberidze

 

Goro, ténor                                                   Luca Casalin

Prince Yamadori, ténor                               Paolo Maria Orecchia

Le Bonze, basse                                            In-Sung Sim

Le commissaire impérial, baryton              Marco Tognozzi

Kate Pinkerton, mezzo-soprano                  Roberta Garelli

Oncle Yakusidé, baryton                              Franco Rizzo

L'officier du greffe, baryton                       Giuseppe Capoferri

Mère de Cio-cio-san, mezzo - soprano       Claudia De Pian

La tante, soprano                                         Rita La Vecchia

La cousine, soprano                                     Ashley Milanese

 

Le mime du papillon                                   Sofia La Cara 

 

 

 

 

 

 

 

Giacomo Puccini considérait Madame Butterfly comme son opéra « le plus sincère et le plus expressif ». Il pouvait écouter sans se lasser cet ouvrage au triomphe duquel il a toujours cru malgré l’échec retentissant que lui réserva le public lors de sa première représentation à la Scala en 1904. L’histoire émouvante de la séduction, puis de l’abandon d’une jeune et naïve japonaise par un officier américain insouciant et égoïste inspire au compositeur une œuvre  résolument novatrice. Devenue aujourd’hui aussi populaire que Tosca ou La Bohème, Madame Butterfly s’est imposée au terme d’une genèse complexe dont les différentes étapes nous éclairent sur la constante volonté de Puccini d’explorer de nouvelles perspectives dramatiques et musicales.

 

 

Résumé

 

 

L’action se déroule au Japon, dans la baie de Nagasaki, vers 1900. L’officier américain Pinkerton découvre sa future épouse Cio-Cio San – dite Madame Butterfly – geisha de quinze ans dont la famille réprouve le mariage. Sharpless, le consul des Etats-Unis, déconseille cette union à Pinkerton. Toutefois, le soir de leurs noces, Pinkerton embrase le cœur de la jeune fille, qui répond à son amour avec timidité avant de se donner ardemment à lui. Trois années passent. Rentré aux Etats-Unis, Pinkerton n’a donné aucune nouvelle à Butterfly, qui ne cesse d’attendre son retour, persuadé que l’officier viendra la retrouver… et découvrir l’enfant qu’elle a eu de lui. Sharpless, qui sait que Pinkerton a refait sa vie dans son pays et s’est marié, demande à Butterfly ce qu’elle ferait s’il ne revenait jamais. Elle se tuerait, répond la geisha. C’est le geste fatal qu’elle commettra en découvrant la vérité, lors du retour tardif mais tellement attendu de Pinkerton, venu chercher son enfant en compagnie de son épouse américaine.

 

 

 

Commentaires du Président de l'Association des Amis de l'Opéra Grenoble :

 

Nous avons débuté l’année 2019 avec une représentation du très célèbre "Madama Butterfly" de Puccini, donnée au Teatro Regio de Turin, le dimanche 13 janvier.

Ambiance hivernale sur la route (grisaille, neige, pluie, vent) mais grand soleil plutôt doux à Turin.

 

Comme à l’habitude  confortablement installés dans la vaste conque du Regio, nous assistâmes à une belle et fort émouvante "Butterfly", dans une mise en scène plutôt sobre de Pier Luigi Pizzi que l’on ne présente plus.

Plutôt sobre en effet pour quelqu’un qui fut un talentueux décorateur flamboyant, baroque, en nous proposant un dispositif assez minimaliste : au centre, la maisonnette japonaise de bois et de papier encadrée de part et d’autre par des terrasses permettant la circulation des personnages. Côté cour, à droite, un grand arbre en fleurs. En fond, un ciel uni. Dispositif très classique, certes mais élégant, aux tonalités douces de beige, de brun, d’ocre, de blanc, magnifié par des lumières chaudes, plein feu ou en effet nocturne ou de pénombre plus intime.

Costumes à l’avenant, traditionnels et tout aussi élégants, sans ostentation.

 

Pizzi a donc misé non pas sur le décorum pittoresque trop souvent présenté, parfois au détriment du sujet, mais sur l’intrigue, sur les relations entre les personnages, au cœur même des sentiment humain, avec une direction d’acteurs-chanteurs très tenue et fort lisible.

Parti pris d’autant plus judicieux qu’il nous permit de vivre au mot près le déroulement du drame, sans fioritures ni parasites. Impact émotionnel garanti !

Entracte bienvenu afin de laisser retomber la tension, l’émotion, l’identification inévitable aux joies, aux espoirs  et déchirements de la si touchante Cio-Cio-San !

Emotion allant crescendo jusqu’au point culminant du final avec le sacrifice de la jeune femme.

Ce diable de Puccini ne nous laisse guère de répit ! Il sait comment nous toucher directement au cœur mais aussi à l’esprit en nous portant à réagir, à prendre position, à réfléchir, sur les débordements et les dérives du comportement humain.

 

L’intrigue, inspirée d’un fait historique avéré (et relatée par l’écrivain Pierre Loti, lui-même acteur de ce genre de simulacre) inscrit dans une époque de troubles et de conflits entre Orient et Occident, est sans complaisance sur les agissements inconséquents ou irresponsables des conquérants. Nous ne pouvons être que bouleversés ou indignés du sort de cette jeune fille, victime d’un cynique simulacre, et dont le rêve n’était autre que d’échapper à une condition modeste, humiliante, voire dégradante, en tant que courtisane. S’échapper en épousant les pseudos valeurs de liberté portées par le bel officier américain.

Encore une fois, malheur à celles et ceux  qui veulent échapper à leur condition première !!

Le répertoire lyrique propose de nombreux opus portant sur cette thématique : notamment avec "Traviata" et avec la "Russalka" de Dvorak, parmi d’autres.

 

Emotion et compassion bien évidemment portées par la superbe partition du Maestro Puccini, minutieusement écrite avec mille attentions à transcrire et insuffler les moindres sentiments des personnages. Partition linéaire où aucune note n’est inutile, ni à retrancher, dans un parfait équilibre harmonique émaillé d’ une palette de colorations sonores, fines délicates, tendues, brûlantes, culminant dans le grand tutti dramatique du final.

Emotion et compassion portées aussi par une équipe d’interprètes talentueux, homogène, mais dominée par la fine silhouette d’une jeune artiste coréenne qui tint la scène d’un bout à l’autre de l’opéra, la soprano Karah Son, dont l’implication n’a jamais fléchit durant les près des 3h de musique ! Voix chaude, claire, parfois fragile et blessée, parfois affirmée et tragique, toujours engagée sans affectation. Bravo l’artiste !

Elle fit l’unanimité et l’admiration du public pour son incarnation sensible et émouvante.

A ses côtés, l’on ne démérita pas non plus !

Avec Murat Karahan, ténor vaillant, nuancé, pour le rôle ingrat de celui par qui arrive le drame, fuyant lâchement ses responsabilités, celui du bel officier Pinckerton.

Avec le baryton chaud et pondéré de Simone Del Savio en la personne du consul Sharpless, le seul qui pressent le drame à venir.

Avec, dans le rôle plus en retrait mais si capital auprès de sa maîtresse, la servante Suzuki, la mezzo-soprano géorgienne Sofia Koberidze.

Sans oublier une galerie de personnages annexes bien dessinés et interprétés avec talent par Luca Casalin en Goro, par In-Sung Sim en Zio Bonzo, et par Roberta Garelli en discrète Kate Pinckerton.

 

Mais, cette représentation n’aurait pas eu tout à fait son éclat sans la direction inspirée du Maestro Daniel Oren, familier du répertoire. Fidèle à lui-même, grand chef d’opéra alliant avec compétence musique et théâtre, sautant, tapant du pied, chantant, au service de la passion, de la douceur et du drame de la partition !

Sous sa baguette, le bel orchestre du Teatro Regio, amené à une excellence musicale par son ancien chef titulaire, malheureusement démissionnaire, Gianandrea Noseda. Mais la musicalité demeure ! Couleurs, nuances, rythmiques, respiration, etc…..

Du beau travail, ainsi que celui du Chœur du Regio, ici de dimension plus modeste, nous offrant un instant unique de poésie pure dans le célèbre chœur à bouche fermée qui clôt le 2ème acte, chanté avec finesse et douceur ! Bravi a tutti !

 

 

Cette représentation restera sans doute dans nos mémoires et nos cœurs comme une importante rencontre entre une œuvre et son public, entre un personnage et son destin qui a transcendé la scène et la fosse pour chambouler les spectateurs. Belle communion comme doit la générer le genre Opéra ! Longue vie à lui !

 

Alain GUIPONT

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