La Traviata à Gênes

La Traviata

Guiseppe Verdi

 

Daniel Smith             Direction                   

Giorgio Gallione      Metteur en scène                  

Guido Fiorato           Décors, Costumes                 

Lana Kos                      Soprano       Violetta Valéry         

Stefano Secco               Ténor           Alfredo Germont      

Rodrigo Esteves           Baryton        Giorgio Germont

 

Franco Sebastiani       Chef de chœur

           

Orchestre du Teatro Carlo Felice                        

 

Coeurs du  Teatro Carlo Felice

La Traviata est assurément l'une des œuvres les plus populaires de Verdi et peut-être de tout le théâtre lyrique. A cause d’abord de son livret, mélodramatique à souhait. A cause d’une musique simple et efficace, admirablement construite dans ses effets, théâtrale au meilleur sens du terme. A cause enfin de ce thème très en vogue au XIXème siècle, celui de la rédemption par l’amour, autant que celui de la fatalité, liée ici à l’image de la courtisane, de la femme perdue, dévoyée – un thème qui introduit dans la théâtralité une note éminemment moderne, le romanesque. Violetta est une héroïne de roman. Et ce qui touche dans La Traviata, c’est cette concentration sur un personnage qui porte toute la douleur du monde, c’est la nudité de son chant, de sa présence obsédante, c’est cette mort d’amour, cette agonie qui se lit dans la musique...

 

Résumé

Entretenue par le riche baron Douphol, la courtisane Violetta Valéry se complaît dans son rôle de « dévoyée » (traviata) en s’étourdissant dans le luxe et les plaisirs pour oublier la terrible maladie qui menace ses jours. Au cours d’une des fêtes qu’elle donne chez elle, Violetta se laisse séduire par Alfredo Germont, un jeune homme passionné dont la ferveur parvient à la détourner de sa vie dissolue. Ayant tout abandonné, Violetta croit pouvoir vivre son amour avec Alfredo à la campagne, loin de l’agitation de Paris ; mais pour goûter ce bonheur simple et bucolique, la jeune femme doit vendre ses biens les uns après les autres. Aux soucis financiers s’ajoutent bientôt les exigences du père d’Alfredo, Giorgio Germont ; il supplie Violetta de rompre avec son fils car la liaison d’Alfredo avec une courtisane est un scandale qui rend impossible le mariage de sa jeune sœur. Violetta refuse de renoncer à son amour, puis elle finit par céder aux prières de Germont. Laissant croire à Alfredo qu’elle le quitte pour retrouver son ancien protecteur, Violetta accepte de se rendre à une fête où elle apparaît au bras de Douphol. Fou de douleur Alfredo rejoint Violetta qu’il insulte publiquement en lui jetant de l’argent au visage pour paiement de leur liaison. Quelques mois passent. Oubliée et ruinée, Violetta va mourir dans son appartement vidé par les créanciers. Seul l’espoir de revoir Alfredo la maintient encore en vie. Le jeune homme et son père arrivent enfin, mais il est trop tard. La joie des retrouvailles et le réconfort du pardon ne suffisent pas à sauver Violetta qui meurt dans les bras de son amant.

 

 

La Traviata est un opéra en trois actes, dont le livret est de Francesco Maria Piave, et la musique de Giuseppe Verdi. Inspiré du roman et de la pièce de théâtre La Dame aux camélias (1847/1852) d’Alexandre Dumas fils, l’opéra fut créé à Venise au Théâtre de La Fenice, le 6 mars 1853.

 

Les commentaires du Président de l'Association des Amis de l'Opéra Grenoble sur  " La Traviata" de Guiseppe VERDI :

 

Avant dernière sortie des Amis, le séjour traditionnel à Gênes du vendredi 04 et du samedi 05 mai 2018 s’est déroulé sous un ciel bien plus clément qu’annoncé : temps sec, assez doux, mêlant nuages et soleil, avec parfois un vent un peu soutenu.

Les Amis ont pu ainsi déambuler à leur rythme dans cette ville foisonnante de monuments, notamment dans le plus grand centre historique urbain encore habité d’Europe : 300 palais, de multiples églises dont un magnifique Duomo, un quartier portuaire entièrement réhabilité où se trouvent pêle-mêle un aquarium, un musée de la mer, des commerces et restaurants, des promenades, etc…

Comme d’habitude depuis plus de vingt ans, nous fûmes reçus "en famille" et en toute amitié par le personnel de l’Hôtel Vittoria, où nous avons trinqué au champagne le samedi midi, ainsi que par celui du Restaurant Perico pour deux excellents déjeuners.

 

Mais avant tout, nous étions venus pour aller au Teatro Carlo Felice écouter "La Traviata" de Verdi, le vendredi soir à 20h30.

Confortablement installés au Platea centrale, avec une bonne vision de la scène, nous avons assisté à une Traviata assez atypique. Oh, non, heureusement sans transposition dite moderne inappropriée, mais plutôt une vision poétique, chargée de symbolique.

Sur scène, côté cour, un immense arbre blanc, dénudé, agrémenté de guirlandes cristallines et de bougies en bout de branche, planté sur un vaste sol noir, brillant, rappelant du marbre.

Tout autour et en fond de scène, de grands rideaux neutres changeant de couleur au gré du spectacle, du blanc, au violet, puis au vert, au jaune et au rouge !

Sur le vaste plateau laissé libre, se jouait la déambulation des protagonistes, avec de rares éléments de décors, des chaises ou des fauteuils, et des bouteilles, etc… selon une chorégraphie très construite. Est apparu un immense rideau depuis les cintres, entièrement composé de verres à boire, lors du Brindisi.

L’ensemble baigné dans des éclairages assez sophistiqués, allant du plein feu irradiant à des atmosphères plus intimistes, voire quasi assombries avec juste le rond d’un projecteur "poursuite"  sur le personnage. Couleurs vives correspondant aux ambiances des différentes scènes de l’intrigue.

Costumes classiques, très XIXème siècle, avec habits noirs pour les messieurs et robes habillées pour les dames.

 

Mais pourquoi un tel dispositif scénique qui se retrouve d’acte en acte ?

A priori déroutante, cette proposition s’imposa d’elle-même sans problème car suffisamment suggestive et chargée d’atmosphères poétiques laissant libre court au déroulement de l’intrigue qui commence par l’évocation de la mort de Violetta durant l’ouverture, avec une belle image graphique de silhouettes noires portant des parapluies. Procédé du "flash back"  souvent utilisé par les dramaturges (cf  la "Carmen" de Toulouse).

Tentons des éléments de réponse, sans doute parcellaire ou imparfaite :

     - 1er acte : arbre enluminé par le plein feu, c’est la fête avec la foule dansante et le fameux "Brindisi" ! Violetta dans son rôle de courtisane, vêtue d’une robe de soirée d’un blanc éclatant, coiffure blonde patinée, rouge à lèvre marqué, évoquant une Marylin Monroe adulée, s’égaie joyeusement malgré les premiers signes de la maladie puis le trouble qui l’envahit lors de sa rencontre avec Alfredo. Elle est alors placée comme une idole par les fêtards, sur le tronc d’arbre. Et la fête tournoie autour d’elle !

       - 2ème acte : l’arbre est toujours là, identique, mais le sol est jonché de pommes !! C’est la campagne !

Idée non dénuée de sens mais qui s’avéra redondante et très incommode pour le déplacement des personnages. Violetta tout à son nouveau bonheur respire l’air frais et croque la pomme à pleine dent ! Pareille à Eve ?

La première partie de l’acte se déroule dans cette ambiance campagnarde de Jardin d’Eden avec l’arbre aux fruits défendus durant la superbe scène centrale de l’opéra, où tout bascule vers le drame : l’entrevue avec Germont père !

Puis c’est le retour à la fête du premier acte ! Les pommes ont disparu mais pas l’arbre solitaire et dénudé !

Le drame éclate au grand jour avec la mise en accusation de Violetta par un Alfredo totalement aveuglé de jalousie et ignorant tout du sacrifice de son aimée sur qui il jette avec fureur la liasse de billets après l’avoir littéralement acculée contre le tronc d’arbre comme une fusillée.

       - 3ème acte : c’est la fin ! L’arbre est à terre, déraciné ! Pareil à lui-même mais déchu ! Au dessus de lui, un immense miroir carré incliné reflétant la vision du sol de marbre craquelé où apparait un grand trou noir là où l’arbre était planté. Comme un œil noir braqué sur nous, ou alors comme un impact de balle sur une vitre ! Celle qui a tué Violetta ?

Cette dernière mourra au sol le long du tronc et son reflet montrera son corps de sacrifiée ! Belle image finale !

 

Ainsi, Giorgio Gallione, le metteur en scène, dramaturge gênois renommé, semble avoir joué la carte d’une référence quasi biblique de l’intrigue : la fête avec l’idolâtrie, puis le pêcher dans l’innocence du jardin d’Eden auprès de l’arbre aux fruits défendus, et enfin la colère divine avec l’arbre à terre et l’œil divin du grand miroir, témoin de la déchéance de la "dévoyée" malheureuse. Celle-ci a cru pouvoir changer de condition en  trouvant la rédemption auprès d’un amour pur et désintéressé. Mais grand mal lui en a pris ! Les convenances sociales terrifiantes de rigidité et d’intolérance l’ont vite condamnée ! On ne change pas de condition impunément !

Malheur à celle qui s’y hasardera, toute de blancheur et de blondeur ! Robe blanche qui sera rougie du sang de son pêcher par un surprenant effet de projecteur.

Juste une remarque à propos de cette silhouette de star à la Monroe : parfaite pour le 1er acte mais pas pour l’acte suivant car Violetta n’est plus du tout la même femme auprès d’Alfredo, à la campagne. Un certain contresens visuel à mon avis.

D’autant qu’ensuite elle reviendra à sa condition première de femme adulée ! Et reprendra son apparence de star. Logiquement.

 

Finalement, beau spectacle assez poétique et au sens dramatique très lisible, voire émouvant au fur et à mesure que le drame se déroule. Bonne maîtrise du jeu théâtral de la part de Giorgio Gallione.

Cependant, sa mise en scène a pu paraitre un peu surfaite et artificielle aux yeux de certains de nos Amis et l’on peut tout à fait comprendre leur ressenti.

 

Du côté des interprètes ? Rien d’exceptionnel mais une bonne troupe homogène.

     - Rôle titre confiée à la soprano Lana Kos, une découverte, possédant de façon évidente tous les moyens vocaux du rôle qu’ elle maîtrise sans problème. Mais, l’on peut encore attendre d’autres nuances, d’autres colorations, dans cette voix solide pour mettre en valeur la palette complète des sentiments du personnage de Violetta.

     - A ses côtés, un Alfredo correct, pas vraiment affirmé au début mais s’améliorant au long de la représentation. Le ténor Stefano Secco est peut être un peu âgé physiquement pour ce rôle. Voix correct parfois tendue.

     - Entre les deux, sorte de "statue du Commandeur", Germont père, tout de noir vêtu, comme d’ailleurs le sera son fils dans le dernier acte. Belle prestation du baryton Rodrigo Esteves à la voix ample et chaude, chargée d’autorité comme l’exige ce rôle terrible par qui le drame arrive.

     - Rien à redire des différentes prestations des personnages secondaires, plus effacés mais honnêtement interprétés.

A noter, la présence continue du Docteur Grenvil, sorte de meneur de jeu de l’intrigue. Personnage proche de Violetta, l’un des rares à ne pas la juger peut-être mais qui sera impuissant face à la maladie qui emportera l’héroïne. Grenvil, interprété par la basse Manrico Signorini, porte un costume noir proche de la soutane ecclésiastique, comme Germont père puis comme Alfredo au final. Sont-ils les représentants d’un ordre social établi et impossible à transgresser ? Un vieux monde opposé au nouvel éclairage de la vie si attendu et désiré par Violetta ? Monde nouveau qu’elle ne pourra atteindre !

     - Beau chœur du Carlo Felice !

     - Bel orchestre du Carlo Felice, qui a mis un peu de temps à se chauffer puis a fait preuve de belles sonorités !

     - Le tout sous la baguette tenue et théâtrale du Maestro Daniel Smith qui a mené sa partition avec rigueur et musicalité.

     - Un beau travail de troupe !

Malgré quelques réserves, voire quelques interrogations, nos Amis ont apprécié cette représentation particulière de cet incontournable chef d’œuvre du répertoire lyrique qu’est la Traviata. Opéra difficile à apprécier car  tellement marqué à jamais par des interprètes de légende !

 

Séjour gênois réussi ! Nous envisageons dans les années futures d’y revenir en prenant plus de temps pour la découverte de la ville et de la région. A voir …..

 

Viva Verdi ! Viva l’Opéra !

 

Alain GUIPONT

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Commentaires: 1
  • #1

    Pierre diana (mercredi, 18 mars 2020 01:11)

    J’ai beaucoup aimé ce décor et la mise en scene