Tristan und Isolde à Turin

 

Tristan und Isolde

 

Richard Wagner (1813-1883)

 

Drame musical en trois actes sur un livret du compositeur.

 

 

Mise en scène : Claus Guth, reprise par Arturo Gama.

Décors et costumes : Christian Schmidt.

Lumières : Jürgen Hoffmann.

 

 

     INTERPRETES :

     

     Peter Seiffert (Tristan),

     Steven Humes (Le Roi Marke),

     Ricarda Merbeth (Isolde),

     Martin Gantner (Kurwenal),

     Michelle Breedt (Brangäne),

     Jan Vacik (Melot),

     Joshua Sanders (Un berger),

     Franco Rizzo (Un pilote),

     Patrick Reiter (Un marin).

 

Orchestre et Chœur du Teatro Regio de Turin.

Chef de chœur : Claudio Fenoglio.

  

Direction musicale : Gianandrea Noseda.

 

Tandis que Tristan ramène sur son navire la princesse Isolde, promise à son oncle le roi Marke, cette dernière se montre irritée par l’attitude apparemment dédaigneuse de Tristan à son égard ; en fait tous deux sont épris l’un de l’autre – mais leur relation est sans issue. En échangeant le philtre de mort par un philtre d’amour, Brangäne, suivante d’Isolde, ne fait que raviver la flamme des amants lorsque ceux-ci boivent la coupe, et c’est dans une ivresse foudroyante qu’ils abordent en Cornouailles. Malgré le mariage d’Isolde, la passion des héros s’épanouit dans le plus grand secret à la cour du Roi Marke ; mais lorsque Marke surprend le couple, il s’estime trahi, bouleversé par le geste de Tristan. Blessé mortellement par Melot, le vassal de Marke, que Kurwenal, le propre écuyer de Tristan, tuera à son tour, Tristan expirera dans les bras d’Isolde, accourue trop tard : la princesse s’abîmera dans la mort, une mort d’amour, seule issue à son union mystique avec Tristan.

 

 

L'avis d'Alain GUIPONT sur cette soirée :

 

Une semaine après le choc émotionnel de la musique élégiaque  de Britten à l’Opéra de Lyon, le dimanche 22 octobre 2017, nous sommes allés au Regio de Turin pour assister à la présentation d’une autre œuvre phare, du XIXème cette fois-ci, à savoir l’impressionnant poème musical du "Tristan un Isolde" de Richard Wagner, incontournable monument du répertoire lyrique.

 

Là également, petit effectif de 18 Amis curieux, dont nous saluons l’implication culturelle et l’envie de découvertes et de diversités musicales.

 

Le Regio nous a proposé la reprise d’une mise en scène crée à l’OpernHaus de Zurich en 2007, élaborée par le metteur en scène allemand Claus Guth.

Celui-ci a choisi de déplacer l’intrigue au sein d’une grande maison bourgeoise du XIXème siècle, évoquant directement celle du riche entrepreneur Otto Wesendock et de sa femme Mathilde, qui ont accueilli Wagner et sa femme, Minna Planer, à Zurich dès 1850.

Wagner éprouva très vite un sentiment pour le moins enflammé à l’égard de Mathilde, sentiment réciproque. Amour platonique selon certaines sources historiques. Certains poèmes écrits par Mathilde ont été mis en musique par Richard dans le fameux recueil des "Wesendonck lieder", dont celui intitulé "Traüm (rêve)" préfigure totalement le grand duo d’amour du IIème acte de "Tristan".

 

Devenu ainsi "drame de la bourgeoisie", l’opéra y perd sa substance mythique primitive fondamentale. L’intrigue est présentée sous la forme d’un déroulé scénique, fort bien agencé au demeurant, des épisodes successifs du drame placés dans un vaste décor tournant présentant les différentes pièces de la grande demeure : façade, antichambre, salons, salle de réception, etc…

Certes, le déroulé du livret original est parfaitement respecté, sans altération mais, sa transposition en une réalité plus prosaïque efface en grande partie la puissance poétique et mythique du drame de ces deux amoureux légendaires, Tristan et Isolde !

Ce parti pris a dérouté une majorité de nos Amis, regrettant justement cette absence de la composante légendaire attachée à cet opéra en particulier et si représentatif de l’univers wagnérien.

 

Cependant, l’implication des interprètes et la qualité des images visuelles proposées, non dénuées parfois d’une certaine poésie, agrémentées d’un travail d’éclairage soigné, ont permis malgré tout une parfaite transmission musicale de cette partition particulièrement complexe et révolutionnaire.

 

Dans la fosse, le Maestro Gianandrea Noseda, chef titulaire du bel orchestre du Regio, nous a offert l’ampleur souveraine de cette musique "unique" de Wagner, de par sa construction en flot continu, en modulations chromatiques étonnantes annonçant déjà la révolution atonale des compositeurs de la "Seconde Ecole de Vienne" : Berg, Webern, et surtout Schönberg.

Passion exacerbée, extase suspendue, grandeur du récit, puissance et douceur, transparences, etc… notamment dans les trois grands passages remarquables que sont le Prélude, le Duo du IIème Acte, et le sublime "Liebestod" final.

Tout y était ! Nous avions confiance en la qualité musicale de l’orchestre du Regio, portée au plus haut point avec l’arrivée du Maestro Noseda. Quoique cette puissance évocatrice et symphonique fût parfois un peu trop forte, notamment au Ier Acte, couvrant les voix.

 

Côté voix, justement :

 - Un Ténor inusable et chevronné en la personne de Peter Seiffert, grand titulaire des rôles wagnériens, à la vocalité encore éclatante et lyrique, même si l’on peut pressentir une certaine érosion de la voix en fin d’opéra. Bien pardonnable pour un rôle aussi lourd.

          - Une Soprano tout aussi chevronnée, la grande Ricarda Merbeth, à la voix chaude et timbrée mais qui nous a très vite paru en retrait au début de l’œuvre. Sans doute se préservait-elle pour la suite d’un rôle tout aussi écrasant que celui de Tristan ? Et bien non, car en toute fin du premier acte, nous vîmes apparaître discrètement en bord droit de la scène une jeune personne qui s’est mise à chanter le rôle d’Isolde alors que Mme Merbeth mimait les paroles. Voix épuisée après 4 représentations en 10 jours ? Défaillance ô combien humaine !

Durant l’entracte, nous fûmes informés de son retrait et de son remplacement par la jeune soprano Rachel Nicholls déjà en charge de l’alternance du rôle au Regio. Voix plus vaillante et brillante qui a conquis le public.

          - Un Baryton honnête avec Martin Gantner dans le rôle du fidèle écuyer Kurwenal

          - Une belle Basse, un peu jeune, avec Steven Humes dans le rôle du noble Roi Marke

          - Une Mezzo-Soprano elle aussi honnête, avec Michelle Breedt, dans le rôle de celle par qui le drame arrive, la magicienne Brangäne, manquant un peu de souffle, de présence. 

          - Orchestre et Chœur du Teatro Regio impeccables, comme à l’habitude.

 

Dans l’ensemble, belle prestation tant musicale que scénique, malgré les réserves émises, de cette œuvre colossale demandant une solide santé vocale des interprètes !

Nous n’avons pas encore bien compris pourquoi Claus Guth a tenu à situer deux beaux moments importants de l’opéra, le duo et la mort finale, dans une salle de banquet, demandant aux interprètes de monter sur la table au prix de certaines difficultés et maladresses. Péché vite pardonné par l’impression d’ensemble favorable.

Sans doute  manquait-il un peu de poésie et d’émotion pour adhérer totalement à la proposition scénique.

Pas de regret pour autant chez nos 18 valeureux mélomanes qui ont fait le voyage. Merci à eux !

 

Alain GUIPONT

 

 

 

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